super Calculateur Jean Zay et superstition technique

Formidable : la France vient d’inaugurer le super-calculateur Jean Zay aux capacités faramineuses telles que le moindre de ses calculs prendrait des années à une population entière dont chaque membre effectuerait une opération par seconde, nous apprend ce matin France Info (mercredi 14 mai 2025).

Que d’ignorance dans une telle information ! Que de préjugés, notamment celui que souligne Günther Anders quant au sentiment d’infériorité de l’homme vis à vis de ses propres machines (« L’Obsolescence de l’homme »). Car en effet ces zillions de trillions de milliards d’opérations que serait capable d’effectuer l’hyper calculateur en une seconde ne sont que bullshit : il s’agit d’opérations élémentaires, décidant entre 1 et zéro. L’humain, dès bébé, fait cela en se jouant et comme sans y penser. Au surplus ces supposées super machines demandent pour fonctionner une débauche d’énergie, écologiquement insoutenable.

En comparaison le plus simple des esprits humains est de loin plus sophistiqué et immensément plus sobre. Les phénomènes psychiques se déroulent à l’échelle quantique, micro-micro infinisétimale. Les plus brefs évènements psychiques détectables se mesurent à l’échelle de l’attoseconde (10-19 seconde). Si l’on dilatait chacune des ces attosecondes pour en faire une seconde, alors notre seconde habituelle durerait quelque 320 millions de millénaires. Autrement dit le simple fait de parler, de penser, de vivre est fondamentalement, sous l’angle combinatoire élémentaire (quantique), un phénomène d’une antiquité phénoménale. Et encore faut-il comprendre que calculent en parallèle 80 milliards de neurones, chiffre qu’il faut encore multiplier en raison du fait que le synapse lui-même est déjà une machine combinatoire d’une extrême complexité, que l’axone présente des foules de structures qu’on croit désormais impliquées dans la sentience et la conscience, que la bête matière blanche qu’on croyait simple câblerie serait également partie prenante de l’activité neurale. Le tout, répétons-le, d’une sobriété admirable et au surplus capable de se répliquer lui-même.

De sorte que la journaliste nous apprenant cette nouvelle mobilise pour le faire des capacités combinatoires largement supérieures et de loin plus synthétiques et globales que le pauvre boulier électronique Jean Zay de 43 tonnes et 2 MWH (un cerveau humain pèse moins de 1,5 kg et un corps entier fonctionne avec quelque 100 watts l’heure).

Il faut en finir avec la superstition technologique assise sur l’illusion que l’art de Prométhée pourrait égaler les travaux et l’art que quatre milliards d’années de vie, eux-mêmes héritiers de 15 milliards d’années de raffinage chimique, biologique, énergétique, complexifiant – ceci à l’échelle de l’univers entier dont le calculateur Jean Zay n’est qu’une application et un sous-ensemble nano restreints , ont conféré à nos cerveaux eux mêmes organisés en sociétés.